19 déc 2017
Image & industries créatives : les enjeux du recrutement
Avec 310 entreprises et près de 1300 emplois, la filière de l’image et des industries créatives se développe.
Un secteur en plein boom et des métiers encore nouveaux
La filière de l’image et des industries créatives englobe des entreprises aux activités et aux besoins variés. Toutes n’ont pas les mêmes attentes mais un point commun les relie : l’avènement du numérique a modifié en profondeur leurs pratiques et les conduit à recruter différemment pour se tourner vers de nouveaux métiers. Les profils émergents apparus ces dernières années souffrent logiquement d’une offre de formation encore faible et d’un niveau d’expérience des candidats limité. "Le digital est un secteur en développement donc par définition c’est un domaine pour lequel le recrutement reste compliqué" explique Philippe Brunet, directeur de l’agence Altimax. Dans le département on observe ainsi une véritable tension entre l’offre et la demande notamment concernant le recrutement de développeurs web. Parmi les profils les plus recherchés on trouve aussi des chefs de projets digitaux et des key account manager, des programmeurs, des designers et des artistes 2D ou 3D pour le secteur des jeux vidéo.
Localement, d’autres difficultés viennent s’ajouter à la nouveauté des besoins exprimés.
Comment retenir les talents en Haute-Savoie ?
Si le département fait preuve d’un dynamisme économique remarquable, les difficultés liées au recrutement pour les entreprises sont nombreuses. Les industries créatives sont confrontées aux mêmes problèmes que les autres secteurs. Elles s’interrogent notamment sur les moyens à mettre en œuvre pour conserver les talents locaux attirés par la Suisse voisine. "Le canton de Genève est le premier employeur haut-savoyard" souligne Sabine Cordier, directrice de l’agence Pôle Emploi d’Annecy. Selon elle, le voisin helvétique capte de nombreux talents dans tous les secteurs et particulièrement dans le numérique.
Par ailleurs, le département bénéficie d’un taux de chômage très faible (5.9 %) comparé au reste de la France. Ce chômage frictionnel signifie que les candidats ont le choix : ils sont en position de sélectionner leur employeur et leur modalité de contrat (CDI, CDD…) ce qui rend aussi le recrutement plus difficile pour les entreprises.
Des freins à l’implantation de candidats dans le département
Le coût de la vie dans le département et la problématique du logement sont également pointés du doigt. Dans le bassin annécien, loyers élevés et fortes exigences de la part des propriétaires (salaire, type de contrat de travail, date d'embauche) limitent l'accès au logement pour les jeunes travailleurs, les salariés en CDD ou les salariés en période d'essai, affirme le directeur de la résidence des Pixels, Philippe Leger. Or, une part des recrutements du secteur numérique est constituée de profils jeunes, non issus du département et en contrat à durée déterminée, voire en stage. Cette résidence implantée à proximité des Papeteries a été pensée comme une alternative proposant des logements meublés sans condition et aux loyers accessibles.
Les acteurs économiques locaux s’associent pour répondre aux spécificités du secteur
Face au dynamisme de la filière et pour pérenniser son avenir, les acteurs institutionnels et privés s’associent. Ils développent ainsi l’offre de formation et les méthodes de recrutement.
La formation fait partie des missions fondamentales de CITIA, qui mène actuellement, avec la CCI de Haute-Savoie, une réflexion de fond pour élargir l’offre pour la filière. Elle a déjà mis en place divers partenariats avec plusieurs établissements. Valérie Sallaz, responsable du service formation, gère ainsi les relations avec les universités mais aussi avec la CCI Haute-Savoie et les écoles. CITIA copilote par exemple la formation Animateur de personnage 3D avec GOBELINS, l'école de l'image. Elle est aussi en étroite collaboration avec le pôle formation digitale de la Chambre de Commerce et d’Industrie d’Annecy, dirigé par Gwyddyan Buvelot. Ce dernier propose quatre parcours à fort potentiel (développeur informatique multi support, Master stratégie et communication digitale, programme design management innovation interactive et programme designer développeur). Certaines de ces formations vont intégrer le site des Papeteries – Images Factory dans les prochaines semaines : "Nous avons cherché à rapprocher les étudiants des entreprises de la filière" explique V. Sallaz.
Même logique pour le Campus numérique in the Alps dont les élèves ont fait leur rentrée en novembre aux Papeteries. Cette école de codage, portée par la French Tech ANNECY (minimum requis Baccalauréat et inscription à Pôle emploi), propose une formation adaptée aux besoins des entreprises dans le domaine du développement web et mobile. Après 6 mois de formation intensive, les étudiants effectueront un an d’alternance, pour certains dans des entreprises implantées, elles aussi, sur le site.
De nouvelles méthodes de recrutement
Face aux problématiques, de nouvelles méthodes de recrutement se développent pour aider les entreprises à identifier les bons profils et à fidéliser leurs jeunes recrues. Le digital constitue par exemple un nouveau levier et de plus en plus de sociétés recherchent leurs futurs collaborateurs sur les réseaux sociaux comme nous le confie Ubisoft : "Dans notre recrutement, nous pratiquons l’approche directe de profils via les réseaux sociaux principalement".
En tant qu’expert de la mise en relation entre candidats et employeurs, Pôle emploi met aussi en place des processus innovants. Au-delà de son soutien à la formation – l’agence d’Annecy a largement collaboré par exemple sur le projet du campus numérique – Pôle emploi a développé un outil qui a déjà fait ses preuves : la méthode de recrutement par simulation. Ce procédé permet de tester les candidats sur des prérequis liés à un poste. A travers divers exercices de mise en situation, on teste le potentiel de chaque profil. Cette méthode a déjà fait ses preuves dans différents domaines et est en cours de développement pour les métiers du numérique.
S’adapter à un marché en pleine mutation
La filière de l’image et des industries créatives est aussi largement touchée par des mutations structurelles du marché de l’emploi. D’après la fondatrice de la start-up annécienne Coworkees, en 2020 on comptera 3 millions de travailleurs indépendants en France. "Face à ce constat, les entreprises sont en train de revoir leurs manières de travailler et de recruter les ressources externes" poursuit Julie Huguet. La jeune chef d’entreprise implantée aux Papeteries célèbre la première année d’existence de son entreprise et rencontre déjà un large succès. Le concept : grâce à un questionnaire intégré au site internet, Coworkees fait "matcher" les profils d’indépendants avec les besoins en personnel des entreprises. Le site compte plus de 2 500 utilisateurs et sa fondatrice est sur tous les fronts : soutenue par Initiative Grand Annecy elle est finaliste du concours "Initiative au féminin", elle est en pleine levée de fonds et après une première embauche, d’autres suivront en 2018 !
La filière de l’image et des industries créatives est un secteur déterminant et porteur pour le département. Les différents acteurs de la formation et du recrutement se sont emparés de cet enjeu et réfléchissent ensemble aux dispositifs qui pourront aider ces entreprises d’avenir à assurer leur développement.